Messe chrismale (C) – 15 avril 2025 –
Homélie de la Vigile pascale
Quand « à la pointe de l’aurore »,
Marie-Madeleine, Jeanne et Marie se rendent au tombeau de Jésus,
elles sont bien loin de réaliser l’extraordinaire ampleur
de ce que l’annonce de deux hommes, éblouissants de blancheur,
va leur révéler.
Et, quand elles en feront le récit « aux Onze et à tous les autres »,
ces disciples auront bien du mal à les entendre.
Il faudra que Jésus, Lui-même, apparaisse
dans la gloire de sa résurrection, au milieu d’eux, pour qu’ils comprennent.
Alors leurs yeux s’ouvriront sur l’immense mystère.
Frères et sœurs, Alléluia !
Le Christ est ressuscité d’entre les morts !
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité,
un homme est entré dans le cercle d’Amour éternel qu’est Dieu.
L’homme Jésus est entré dans la communion de la vie divine,
dans l’éternelle circulation d’Amour du Père, du Fils et de l’Esprit Saint.
Cette entrée de l’homme en Dieu, Dieu l’a désirée de toute éternité.
Depuis la création du monde, Dieu attendait ce jour.
Les grands textes que nous venons d’écouter en cette nuit pascale
racontent cette espérance au long de l’histoire biblique.
Au commencement, Dieu crée l’univers, habité par l’espérance
que cet autre que lui-même le rejoigne dans sa vie.
Et le Seigneur s’est réjoui de sa création :
« Et Dieu vit que cela était bon ! ».
Le sacrifice d’Isaac dans la Genèse préfigure l’offrande d’amour de Jésus
se donnant au Père, et ouvrant à ses frères l’accès à la vie.
Le récit de l’Exode annonce la paque de Jésus
dans la traversée des eaux de la mort du peuple élu,
et la libération de son esclavage en Egypte.
Les prophètes, envoyés par Dieu, qui exhortent le Peuple d’Israël
à recevoir la sagesse de l’Esprit, donnée gratuitement,
comme une eau qui lave et désaltère,
un festin qui remplit de joie, une source de vie
prédisent le don du Christ.
Ainsi, frères et sœurs,
aux yeux des chrétiens, toutes les Écritures
pointent vers l’événement Jésus et son apogée pascale.
Toute la révélation biblique converge vers cet extraordinaire événement de salut
qu’est le passage en Dieu de Jésus de Nazareth.
Jésus Christ, mort et ressuscité,
a accompli ce que Dieu espérait depuis toujours.
Pour la première fois dans l’histoire, un homme,
parce qu’il est Fils de Dieu, rempli de l’Esprit Saint,
est parvenu à dominer totalement le mal jusqu’au paroxysme de la croix.
Il n’a mis aucune entrave à la perfection de l’amour de Dieu en lui.
Et Dieu s’est réjoui de pouvoir enfin achever
tout son ouvrage d’amour dans un homme !
L’ Amour qu’est Dieu a ressuscité Jésus d’entre les morts !
Le Christ est vainqueur du mal et de la mort !
Frères et sœurs,
le magnifique événement qu’est la mort et la résurrection de Jésus
va loin !
Car la pâques de Jésus n’est pas demeurée repliée sur elle-même.
Elle atteint la vie du monde.
Elle nous rejoint dans nos vies !
La lente histoire de la révélation biblique
ne pointe donc pas seulement vers l’évènement
de la mort et la résurrection de Jésus.
Elle pointe vers notre propre passage de la mort à la vie en Dieu.
L’espérance de Dieu depuis la création du monde nous est destinée !
Frères et sœurs,
comment ne pas être débordants de reconnaissance
et d’actions de grâce au Père devant cette sublime révélation :
l’œuvre de Dieu, depuis la création du monde,
est orientée vers notre entrée dans la vie avec Lui pour toujours !
La longue et grande espérance de Dieu est tendue vers notre salut !
Et le Père a tout accompli dans son amour pour nous sauver,
jusqu’à nous donner son Fils Jésus qui a pris sur Lui
les conséquences mortifères du mal et de nos péchés afin de les détruire,
et qui a répandu sur ses disciples le souffle de l’Esprit Saint.
« C’est pour vous que le Christ, lui aussi, a souffert ;
Il vous a laissé un modèle afin que vous suiviez ses traces.
Lui-même a porté nos péchés, dans son corps, sur le bois,
afin que, morts à nos péchés, nous vivions pour la justice.
Par ses blessures, nous sommes guéris. » (1 P 2,21.24)
proclame saint Pierre dans sa première lettre.
Frères et sœurs,
Dieu ne s’est rien épargné pour nous délivrer du péché et de la mort,
et nous voici libres, libres d’accueillir ou non son amour sauveur
qui nous ouvre à la vie éternelle en Lui.
Alexine, Bérangère et Emma,
cette grande espérance de Dieu depuis les origines
est parvenue jusqu’à vous.
Cette nuit de Pâques, elle vous rejoint,
et elle vous appelle à la recevoir pleinement
dans les sacrements de l’initiation chrétienne.
Le baptême fait de nous des êtres nouveaux.
Saint Paul aime méditer sur ce mystère.
Il y revient souvent dans ses lettres, comme dans le beau passage
de l’épître aux Romains que nous avons écouté ensemble :
« Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort,
nous avons été mis au tombeau avec lui,
c’est pour que nous menions une vie nouvelle,
nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père,
est ressuscité d’entre les morts ».
Alexine, Bérangère et Emma,
lorsque vous serez plongées dans l’eau baptismale,
un nouvel élan de vie jaillira en vous.
Vous recevrez l’infini amour de Dieu qui,
dans la mort et la résurrection de Jésus,
interrompra en vous les conséquences mortifères du mal et du péché
et vous ouvrira à la vie avec Lui.
Unies au Christ,
le baptême vous donnera de naître à la vie d’enfants de Dieu.
Vous vivrez alors, non plus d’abord,
à partir de votre moi et pour votre moi,
mais à partir de Dieu en vous et pour Dieu.
Baptisés, vous serez appelés à témoigner auprès de tous
de ce décentrement de vous-mêmes en Dieu,
avec Jésus et dans l’Esprit-Saint,
qui rend plus fraternel et qui ouvre
au grand passage de la mort à la vie éternelle en Dieu.
Alexine, Bérangère et Emma,
cette nuit, vous recevrez aussi sur vous la marque de l’Esprit Saint
dans le sacrement de la confirmation.
L’Esprit Saint sera votre courage et votre force
pour vivre en témoins du Christ Sauveur dans vos vies.
Vous communierez aussi pour la première fois
au pain et au vin, devenus corps et sang du Christ.
Vous formerez alors avec vos frères et sœurs de l’Église, un seul corps,
le corps du Christ Vivant, signe de sa présence au milieu du monde.
Chaque dimanche, vous serez appelés
à vous nourrir à sa parole et à son pain,
en communion avec vos frères et sœurs,
pour tenir bon sur la route du Christ.
Frères et sœurs,
cette nuit pascale, il y a de la joie dans le ciel.
« Il y a de la joie devant les anges de Dieu
pour un seul pécheur qui se convertit. » (Lc 15,10)
proclame Jésus dans l’évangile.
Cette nuit sainte,
le Seigneur se réjouit de voir de nouveaux enfants le rejoindre dans sa vie.
Et c’est toute l’Église qui se réjouit avec Lui.
Frères et sœurs,
Rendons grâce pour la vie que nous recevons de Dieu
dans les sacrements de l’Eglise.
Courrons désormais dans l’espérance de la vie éternelle.
Le chemin qui y conduit est celui de l’amour vainqueur en Jésus.
En Lui que nous trouvons la force et la confiance,
Portés par le souffle de l’Esprit-Saint,
soutenus par la nourriture du Christ et la communion de l’Église,
vivons en témoins de l’espérance de Dieu qui ne déçoit pas.
Amen !
Alléluia !
+ Mgr Laurent LE BOULC’H