L’Épiphanie du Seigneur (C) – 05 janvier 2025
© Photo Notre-Dame de la Treille-Brigitte Naeye
Textes du jour : Is 60, 1-6 — Ps 71 (72), 1-2, 7-8, 10-11, 12-13 — Ep 3, 2-3a.5-6 — Mt 2, 1-12
Homélie Épiphanie 2025
L’or, l’encens, la myrrhe. (Mt 2)
On imagine les bergers, les yeux écarquillés devant ces présents. Du jamais vu dans leurs pâturages.
On imagine le bœuf et l’âne de St François d’Assise, éberlués qu’on vienne de si loin adorer un petit d’homme.
On imagine Hérode pestant contre ces mages, à qui il avait pourtant recommandé de repasser discrètement par son Palais.
On imagine Joseph ému dans son silence de Gardien du Fils de Dieu, et Marie recueillant en elle tous ces événements.
L’or, l’encens, la myrrhe
Des biens aussi précieux que rares.
Des coffrets débordants devant une mangeoire d’étable.
Le monde à l’envers.
Les codes mondains submergés.
Des mages prosternés.
Et, parce que prosternés de cœur et d’esprit, donnant sens à leurs cadeaux.
Écoutons St Pierre Chrysologue, Docteur de l’Église du 5e siècle. Grand catéchiste de la foi.
« L’Épiphanie est solennité qui nous révèle que Dieu est venu dans un corps d’homme. Les mages considèrent avec profonde stupeur, ce qu’ils voient en ce lieu. Le ciel sur la terre. La terre dans le ciel. L’homme en Dieu. Dieu en l’homme. Celui que le monde entier ne peut contenir étant dans le corps d’un tout petit».
Pierre Chrysologue ajoute : « Par l’encens, ils confessent Dieu ; par l’or, le Roi ; par la myrrhe, sa mort future. Les païens qui étaient les derniers deviennent premiers. La venue des païens à la croyance est inaugurée par la foi des mages ».
Frères et sœurs, la foi des mages est primordiale. Elle universalise Noël.
Elle évangélise notre triple attitude païenne en 2025.
Elle convertit notre toute puissance.
Jésus est Dieu ! Tout l’encens du monde ne suffirait à dire sa transcendance. Sa divinité.
« Que ma prière s’élève comme l’encens, et mes mains comme l’offrande du soir ! » (Ps 140)
Jésus est Roi ! Tout l’or du monde ne parviendrait à signifier sa puissance. « Ma royauté n’est pas de ce monde » (Jean 18)
Jésus est vivant ! Il se donne librement dans un corps qui ne sera pas retenu par la mort. La myrrhe et l’aloès de Nicodème peuvent peser cent livres (Jean 19). Ces parfums ne sauront jamais de trop, pour exhaler l’amour dont Jésus a porté le salut du monde.
L’or, l’encens, la myrrhe, dans notre imaginaire, nous portent bien au-delà de l’émerveillement.
Ils creusent en nous le disciple de Jésus.
Nous sommes si souvent retenus par le paganisme d’aujourd’hui.
La puissance des hommes est orgueilleuse, quand le Magnificat lui annonce que Jésus la renverse et élève les humbles.
La divinité de Jésus agace, depuis des siècles, ceux qui veulent le réduire à un leader généreux.
La rédemption reçue en Jésus perturbe ceux qui voudraient bien que le christianisme s’éteigne tout simplement.
L’or, l’encens, la myrrhe sont les symboles de ce que Dieu nous dit dans l’incarnation.
La myrrhe de 2025, c’est notre courage à refuser qu’on dispose de la vie, comme si elle devait être décrétée par soi.
L’or de 2025, c’est la volonté de partager équitablement nos richesses au nom d’un Royaume de justice déjà là et pas encore.
L’encens de 2025, c’est notre capacité à adorer en esprit et vérité notre Seigneur, et nul autre que Lui.
Le philosophe chrétien Maurice Blondel osait dire : « Avant de convertir les mécréants, il faut convertir les convertisseurs ».
Accueillons cette provocation pour le bien de notre retournement intérieur.
Déposés à Bethléem, l’or, l’encens et la myrrhe confèrent à Jésus toute l’adhésion de notre obéissance, de notre chasteté, de notre charité.
Chrysologue a raison de dire que la foi des mages change tout.
Elle fait accéder au mystère les plus lointains.
Dieu est libre, par ses mages, de donner Jésus à connaître.
Dieu est libre en 2025 de se révéler à qui bon lui semble.
L’année jubilaire nous entraîne à la suite des sentinelles de lumière.
Nous croyons habiter la porte d’à côté.
Nous pensons connaître le Christ.
Nous avons un incroyable chemin de conversion à entreprendre.
La route à accomplir est en nous-mêmes.
C’est au dedans que Dieu veut habiter, afin que s’opèrent toutes les transformations structurelles dont l’univers est en attente.
À Mayotte, comme dans la plus esseulée des personnes de nos cités de Flandres, Dieu est en attente de mages authentiques.
L’amour attend ses témoins.
Qui guettera l’étoile ?
Qui sera pèlerin d’espérance ?
Mgr Bernard Podvin, Chanoine ND Treille