Homélie du 19 février 2023

« Soyez parfaits, comme votre Père céleste est parfait ! » (Mt5,48) L’injonction est forte qui peut nous effrayer ou générer en nous de la culpabilité : Je n’y arriverai jamais. Ce n’est pas possible. Et puis, il faut aussi penser à soi, se faire plaisir, profiter de la vie. On me le dit tous les jours.

Alors que faut-il penser ? Ce que l’on entend à l’église est-il réaliste ? Aimer ses ennemis, donner sans compter, ne pas riposter au méchant…, c’est de la folie ! Peut-être Jésus s’adresse-t-il à quelques-uns ? Il semblerait que non. Il s’adresse à tous les disciples, à vous, à moi. C’était déjà le cas avec la Loi de Moïse : « soyez saints car moi le Seigneur votre Dieu je suis saint » (Lv19,2). Voilà une indication précieuse : les croyants sont invités à la sainteté car Dieu est saint. Ils sont, nous sommes invités à être parfaits comme Dieu est parfait. Pas seulement en l’imitant mais en vivant de sa vie, en laissant son Esprit Saint agir en nous. Voilà qui change tout. La sainteté n’est pas un idéal inatteignable, une pression morale insupportable. Elle est participation à la vie de Dieu, transformation intérieure par effet de la grâce de Dieu. « Ne savez-vous pas que vous êtes un sanctuaire de Dieu et l’Esprit Saint habite en vous » (1Cor3,17)Voilà pourquoi il est important que nous entretenions la relation à Dieu dans la prière, la lecture de la Parole de Dieu, les sacrements, la vie fraternelle. Contemplons l’immense amour de Dieu, sa tendresse, sa miséricorde, sa générosité. Louons-le comme le fait le psaume 102. Accueillons son amour pour nous et laissons-le agir en nous pour que nous aimions comme lui, pour que nous donnions gratuitement comme lui, comme Jésus qui a donné sa vie pour nous et nous a aimé jusqu’à l’extrême (Jn13,1), jusqu’à la folie de la croix (1Cor1,18).

« Facile à dire », me direz-vous… mais plus difficile à mettre en pratique. Certes ! Mais nous devons pas désespérer de nous-mêmes et encore moins de la capacité de l’Esprit Saint à nous renouveler à l’image de Dieu, à chasser en nous la peur, et l’inquiétude de perdre la face. L’invitation à la sainteté est irrecevable ou en tout cas irréalisable pour qui compte sur ses propres forces, pour qui cherche à atteindre l’idéal à la force des poignets. Elle devient opérante si nous l’accueillons dans un cœur humble et pauvre, si nous mendions la grâce de Dieu. « Qui veut sauver sa vie la perdra, qui accepte de la perdre à cause de moi et de l’évangile la sauvera » (Mc8,35)

Le sermon sur la montagne que nous lisons depuis plusieurs dimanches est une invitation forte à la conversion. Il vise à faire de nous des disciples missionnaires, des hommes et des femmes bouleversés par la rencontre du Christ, émerveillés de l’amour de Dieu et heureux de partager le cadeau qui leur est fait. Aujourd’hui encore Jésus nous invite à nous démarquer des publicains et des païens. Il énonce clairement l’enjeu : « être vraiment les fils de notre Père qui est aux cieux ». Autrement dit vivre vraiment de notre baptême, de notre appartenance au Christ ( 1Cor3,23) et vivre ce que le Concile Vatican II appelle « la vocation universelle à la sainteté » (LG39-42). Que le carême qui s’approche soit pour nous l’occasion de répondre plus généreusement à cet appel. Amen !

Père Bruno CAZIN, Délégué général de l’Administrateur diocésain.