Chronique du Recteur #1

Un recteur confiné

Un temps de désert

Avec l’autorisation nécessaire, je me rends deux fois par jour à la cathédrale afin de vérifier que tout va bien. Je traverse un centre-ville désert : sauf exception, les magasins sont fermés et il y a quelques personnes sur les trottoirs dont des SDF.

Désert

La ville d’habitude si animée, est déserte. La cathédrale est vide.

Cela me fait penser au désert où Jésus fut mené par l’Esprit Saint pour y être tenté. Etre tenté ? C’est être éprouvé dans les liens qui constituent notre identité : ‘si tu es le Fils de Dieu’, dit le diable à Jésus. Jésus est éprouvé dans les liens filiaux qui le rattachent à son Père mais il ne succombe pas à la tentation.

En ces jours de confinement, mes relations avec mes proches, avec mes amis, sont éprouvées. Heureusement, je peux échanger par téléphone, mail, skype,… mais ce n’est pas la même chose : la rencontre physique me manque. Cela éprouve mes relations avec Dieu : je ne peux plus célébrer l’eucharistie avec une assemblée et pour mes frères baptisés, même si heureusement, il y a des messes retransmises, ils ne peuvent pas communier… C’est peut être l’occasion de rejoindre des frères qui vivent cela de façon habituelle.

Avec mes relations, c’est mon rapport au temps qui change. Mes habitudes et mes rythmes sont changés et il m’arrive de ne plus savoir le jour que l’on est. Les événements prévus ne peuvent se dérouler. Les prévisions de rencontres, de célébrations sont comme suspendues et les pages de mon calendrier se blanchissent. Me voilà appelé à vivre le temps présent : une occasion à retrouver l’essentiel, à écouter la Parole de Dieu et à redécouvrir la Liturgie des Heures (laudes, vêpres,…).

Tout cela s’est imposé par la situation sanitaire. Alors que les années précédentes, j’organisais mon Carême, je choisissais des points d’effort, aujourd’hui, je dois accepter de ne pas maîtriser mon carême. Mais n’est-ce pas cela le Carême ? Accepter de ne plus être le maître. N’est-ce pas un appel à vivre l’abandon et la confiance. J’écoute la parole du prophète Jérémie : ‘Seigneur, c’est à toi que j’ai remis ma cause’ Jr 11, 20 –

J’imagine que ce que je vous confie, vous le vivez pour une part. Le confinement éprouve vos liens familiaux, amicaux, vos liens avec Dieu. Comment tenir ? Comment s’y retrouver?Il n’y a pas de remède ‘miracle’ mais je vous conseille d’utiliser vos téléphones, vos ordinateurs pour garder le contact, renouer des contacts. C’est en s’écoutant, en nous soutenant mutuellement que nous pourrons poursuivre la route ensemble. Écoutons aussi la Parole de Dieu de ces jours qui précèdent la semaine sainte : elle nous assure de la présence de Dieu à nos côtés.

De tout cela, nous aurons l’occasion d’en reparler. Nous nous soutenons.

P. Bruno Mary, recteur de la cathédrale, 1er avril 2020