5ème dimanche de Pâques (B) – 28 avril 2024
L’image de la vigne ne nous est pas très familière car nous ne vivons pas dans une région de vignobles.
Jésus utilise cette image car dans la belle terre de Judée, de Galilée et de Palestine, la vigne est partout.
Jésus reprend aussi cette image car elle est très présente dans les textes bibliques : dans le premier Testament, en effet, l’image de la vigne est employée pour signifier la relation entre Dieu et le peuple qu’Il a choisi, une relation privilégiée, intime même comme l’union des époux.
Les juifs se glorifiaient de cette élection divine mais cette élection n’est pas seulement une faveur et un privilège ; c’est une responsabilité, elle oblige. Si Dieu a choisi ce peuple et l’a comblé de bienfaits, c’est pour qu’il soit une vigne modèle. Ce ne fut pas toujours le cas, loin s’en faut, et les prophètes ont dû souvent le rappeler quand les juifs étaient infidèles à la Loi ou quand ils oubliaient de pratiquer la justice et le bien.
Dans l’Évangile de ce dimanche, Jésus affirme qu’il est lui-même la vigne véritable répondant parfaitement à l’attente du vigneron, son Père, en faisant en toute chose sa volonté et sa joie, jusqu’à donner sa vie pour que, de son côté transpercé sur la croix, coule la sève de vie divine pour toute l’humanité. N’est-ce pas là le plus beau fruit que le Christ pouvait donner ?
La vigne, ce n’est donc plus un peuple dont on fait partie par hérédité. Mais la vigne se déploie désormais parmi les croyants de toute langue, de toute culture, de toute race et de toute nation ; croyants qui accueillent et écoutent la Parole de Jésus et qui reconnaissent en Lui le Fils de Dieu, le Christ à qui nous sommes incorporés, greffés par le baptême, d’où la parole de Jésus qui dit « je suis la vigne, vous êtes les sarments » ; et qui nous invite à « demeurer en lui » pour pouvoir « porter beaucoup de fruit ».
Ce verbe « demeurer » est employé 10 fois dans le texte de ce dimanche et 40 fois dans l’ensemble de l’Évangile de Jean. Cette insistance signifie qu’il ne suffit pas de faire partie de la vigne mais qu’il faut tenir, traverser l’épreuve du temps, résister à la tentation de se passer de Dieu en faisant notre vie en dehors de Lui, ou en nous croyant maître de notre destin nous prenant pour dieu comme le Serpent trompeur le persiflait à Adam et Eve : « vous serez comme des dieux ».
Or Jésus prévient : le sarment ne peut pas produire du fruit s’il se détache de la vigne. Il s’agit donc d’être « branché » comme on dit aujourd’hui !
Jésus invite avec insistance ses disciples, nous les baptisés, à rester brancher sur lui, à rester connecté avec Lui pour être nourri de sa sève et pour pouvoir porter du fruit, car précise-t-il encore : « en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire ».
Oui, c’est Lui qui est notre vie, ici-bas et dans l’éternité. C’est en Lui que notre vie prend sens. C’est avec Lui que nous pouvons traverser toutes les épreuves de l’existence et les surmonter. Il est notre soutien, notre espérance, notre avenir.
Pour être branché, il faut constamment s’imprégner de ses paroles, de la Parole de Dieu ; il faut entretenir avec Lui une relation personnelle et continuelle dans la prière ; il faut se ressourcer et laisser couler en nous la sève de la vie nouvelle reçue dans les sacrements, et d’abord celui de l’Eucharistie où le Christ se donne en nourriture pour soutenir notre foi et pour que nous portions du fruit.
Ce fruit c’est d’abord celui de l’amour, amour de Dieu et amour des autres, ce qui constitue l’unique commandement laissé par le Seigneur. La deuxième lecture rappelait ce commandement : « mettre notre foi dans le nom de Jésus Christ et nous aimer les uns les autres. »
Aimer non pas en paroles et discours mais, comme le dit St Jean, en actes et en vérité. C’est à cela qu’on reconnaît les disciples du Christ.
Aimer c’est facile à dire et à répéter mais comme c’est difficile à vivre dans le quotidien ! Dieu ne nous demande pas seulement de ressentir de l’affection, de l’amitié, de la sympathie ou de la commisération pour tout le monde mais bien d’agir, de nous mettre au service les uns des autres, selon nos charismes et vocations propres.
Dieu veut se servir de nos mains, de nos paroles, de notre cœur pour se faire connaître, pour se faire proche, pour aimer chaque personne et la faire accéder à la Vie en plénitude qu’Il est venu Lui-même apporter à l’humanité en quête de bonheur et de sens.
Acceptons que l’Évangile, tel un sécateur, nous émonde, nous interpelle sans cesse, pour pouvoir porter beaucoup de fruit !
Père Christian Portier, Chancelier du diocèse de Lille