5ème dimanche de Carême (B) – 17 mars 2024
« Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur » avons-nous entendu dans la première lecture. Se mettant à l’écoute de Dieu, Jérémie a cette intuition que Dieu se fait connaître chez nous tous et nous toutes.
Et en cela, le prophète Jérémie nous donne à savoir en quoi tous et toutes nous sommes frères et sœurs et que des relations pleinement humaines dans lesquelles nous nous reconnaissons égaux entre nous sont possibles. Oui, toutes et tous ici réunis, nous portons en notre cœur la loi de Dieu, le logos divin, c’est-à-dire la parole de Dieu.
Cette loi de Dieu, Jérémie nous livre ce qu’elle est : Dieu se fait connaître : « Car tous me connaîtront » dit le texte. Et cette connaissance se trouve au fond de notre être, cette connaissance est gravée sur notre cœur. Le texte de Jérémie ajoute qu’il est donc inutile d’instruire son frère ou sa sœur, car de fait nous sommes instruits de Dieu lui-même.
Nous sommes donc égaux, Dieu établit une égalité entre nous en cela qu’il se fait connaître en chacun de nous. Connaissance intime, connaissance intérieure. Oui, la voix de Dieu résonne sous forme de murmure en chacun de nous.
Ce texte de Jérémie permet de bien comprendre cette connaissance toute particulière qui est celle de Dieu. D’ordinaire, la connaissance est bien souvent un outil de domination. Ceux qui savent dominent ceux qui ignorent, c’est la relation maître/ élève. Et nous savons bien qu’une manière de garder notre pouvoir, c’est de garder les informations et de ne pas les transmettre. Ou transmettre le minimum d’informations ou bien encore de transmettre des informations tronquées. Internet est un formidable outil de domination, et les sites de ceux qui savent, ou qui croient savoir ou encore qui font circuler des informations sciemment fausses sont consultés par ceux qui veulent savoir et qui n’ont pas d’autres moyens de vérifier ce savoir internet que le nombre de “like” du site. Tout lieu d’enseignement court le risque d’un abus de pouvoir.
Ici, Jérémie nous fait savoir que l’enseignant c’est Dieu lui-même. Et en y réfléchissant, quel humain, qui d’entre nous peut faire connaître qui est Dieu et faire connaître ce que veut Dieu ? Autrement dit qui peut connaître et donc faire connaître cet amour incommensurable, créateur du ciel et de la terre et de tout ce qui y vit, des ciels et des étoiles ? Nous devons reconnaître que personne, mis à part Dieu, ne peut connaître Dieu et faire connaître Dieu. Cet amour immense se fait connaître en chacun de nous.
Parce que dans l’Eglise, seul le Christ connaît Dieu et sa volonté et que nous allons à Dieu par le Christ qui nous révèle l’amour du père pour nous ses filles préférées et ses fils préférés. Et cet amour nous essayons d’y répondre en essayant toutes et tous de nous configurer au Christ au mieux que nous pouvons, au mieux de nos forces, avec toute notre bonne volonté, dans des conditions parfois difficiles, impossibles mêmes.
Et cette bonne volonté chez certains et certaines d’entre nous est héroïque tant les conditions de vie qui sont les nôtres sont parfois difficiles. Et personne ne peut nous juger, et encore moins nous condamner parce que nous sommes de bonne volonté et que nous essayons, avec toute cette bonne volonté qui est la nôtre et avec toutes nos forces, de répondre à l’amour du Père, nous essayons d’être fidèle à notre foi en Christ à notre place, dans nos conditions de vie.
Et cela, nous devons toujours l’avoir en tête et dans le cœur, je n’ai pas à faire à mon frère ou à ma sœur la leçon sur Dieu ou sur sa volonté. Parce que le frère et la sœur ont aussi dans leur cœur, inscrite la Loi de Dieu, et ce frère et cette sœur ont aussi au plus profond d’eux-mêmes cette parole de Dieu qui leur est adressée. « Tous me connaîtront, des plus petits, jusqu’aux plus grands », précise encore Jérémie. Je n’ai pas à leur faire la leçon parce qu’ils connaissent déjà cette loi de Dieu inscrite dans leur cœur.
Et ce que nous, nous devons avoir dans le cœur et maintenir en tête, c’est cette décision de Dieu : « je pardonnerai leurs fautes, je ne me rappellerai plus leurs péchés ». Et moi, je trahis cette parole de Dieu, je trahis l’amour de Dieu le Père si j’outrepasse cette décision de Dieu et si j’enferme mon frère ou ma sœur dans le Christ par mes jugements. Mes jugements péremptoires, mes jugements propres sont bien souvent issus d’un cœur de pierre, incapable de miséricorde. A l’exact opposé du cœur de Dieu immensément miséricordieux.
Le diacre est celui qui porte une tunique cousue. Cette tunique est le tablier de service. Diacre de « diakonos » en grec. Cela signifie : serviteur. Le diacre est au service de la communauté, il est au service de l’Eglise. Au service de la sœur ou du frère, au service de l’autel et au service de la Parole. Et si le diacre à une étole de biais (à la différence du prêtre qui a l’étole autour du cou), cette étole va du cœur, jusqu’à la main. Le cœur qui est le lieu de la compassion et la main qui aide, qui relève.
Le prêtre porte la chasuble, cette longue et ample tunique qui renvoie à la charité longue et ample du Christ. La charité, c’est-à-dire l’amour du prochain dont le modèle est l’amour du Christ.
Service auprès du frère et de la sœur, charité envers notre frère et notre sœur, telle est notre mission, notre unique mission. Et ce, non pas en notre nom mais au nom du Christ. Mais que c’est difficile ! Qu’il est difficile de ne pas faire écran et donc de ne pas masquer la parole du Christ par notre ego ou par nos propres affirmations et nos propres jugements.
Alors, pour ne pas oublier notre devoir de charité ou de service, c’est un devoir que de nous adresser à nous-mêmes les paroles du psalmiste :
« Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu
Renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
Ne me reprends pas ton esprit saint. »
Oui, Jésus est le seul chemin qui mène au Père, chemin que nous ne pouvons pas trouver par nous-mêmes. L’évangile de ce jour nous le rappelle. Les Grecs venus à Jérusalem pour la fête de la Pâque le pressentent. Ils pressentent que Jésus est le Christ. Ils veulent vérifier qu’il s’agit bien du Messie. Et toutes celles et ceux, de Marie-Madeleine à Zachée, de Pierre l’apôtre à la Samaritaine qui ont rencontré Jésus, dans une rencontre authentique, ont senti qu’il s’agissait bien du Messie. La loi divine dans leur cœur, loi inscrite par Dieu a authentifié en eux qu’il s’agissait bien du Messie.
Et nous, lorsque nous témoignerons le matin de Pâque que le Christ est vraiment ressuscité, nous témoignerons par-là que l’amour du Christ pour l’humanité est tel que Jésus a accepté de mourir pour nous et que l’amour de Dieu est tel qu’il a ressuscité son Fils.